Lévitations, apparitions, transfigurations, ectoplasmes, spectres, fantômes, auras, fluides mesmériques, etc.… pouvait-on imaginer que ces phénomènes occultes - par nature cachés - avaient pu autant être photographiés ?

L'exposition

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OE1bLévitations, apparitions, transfigurations, ectoplasmes, spectres, fantômes, auras, fluides mesmériques, etc.… pouvait-on imaginer que ces phénomènes occultes – par nature cachés – avaient pu autant être photographiés ? Fruit d’un travail de plusieurs années de recherche, l’exposition réunie près de 250 photographies de ces phénomènes, exhumées des archives des sociétés occultes, de collections privées ou publiques. Organisée conjointement par la Maison européenne de la photographie à Paris et le Metropolitan Museum de New York, cette exposition, et le catalogue qui l’accompagne, se proposent non seulement de porter à la connaissance du public ces extraordinaires documents, pour la plupart réalisés entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe, mais aussi de tenter de comprendre leur raison d’être, de retracer les conditions de leur réalisation, d’expliquer les espoirs ou les déceptions qu’ils ont suscités… bref, de renouer avec le fil de leur singulière histoire. L’exposition qui suit le cours de cette histoire est divisée en trois parties.

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La photographie des esprits
Apparu à la fin des années 1840, le spiritisme croit à la possibilité de communiquer avec l’esprit d’un mort ou de le faire réapparaître. Dès les années 1860 aux États-Unis, puis à partir des années 1870 en Europe, plusieurs photographes, mettant en avant leurs pouvoirs médiumniques, se spécialisent dans la production de photographies montrant, à côte du modèle, l’effigie translucide d’une personne décédée. Cette première phase de la photographie spirite, essentiellement mercantile, est marquée par de multiples procès qui, selon leurs verdicts, favorisent ou limitent le développement de la pratique. Les millions de morts de la première guerre mondiale sont à l’origine d’une forte recrudescence de la photographie spirite en Europe. C’est surtout en Angleterre que se développe cette deuxième phase de la photographie spirite, cette fois-ci davantage expérimentale que commerciale.

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La photographie des fluides
Dans les dernières décennies du XIXe siècle, l’occultisme est agité par un débat opposant les adeptes du spiritisme à ceux de l’animisme. Les premiers sont persuadés que les phénomènes occultes trouvent leur origine dans l’au-delà, tandis que les seconds considèrent qu’ils résultent du pouvoir des médiums. Cette opposition favorise l’émergence d’une deuxième catégorie iconographique : la photographie des fluides. Celle-ci consiste à fixer, sans appareil, sur la seule plaque sensible, les fluides émanant du médium : la force vitale, l’âme, mais aussi les pensées, les émotions, ou les rêves. S’il est possible de faire remonter ce type d’expériences au début des années 1860, c’est surtout au tournant du siècle que la photographie fluidique se développe en se revendiquant de la légitimité scientifique des recherches sur les rayonnements : la radioactivité et les rayons X. En France, certains opérateurs tentent ainsi de photographier leur énergie vitale ou leurs pensées en apposant simplement sur la plaque sensible leurs doigts ou leur front. Malgré les multiples réfutations d’experts, démontrant que les traces obtenues ainsi ne sont en fait que des artefacts photographiques dus aux conditions mêmes de l’expérience, ces tentatives pour enregistrer le fluide humain perdurent tout au long du XXe siècle. La photographie d’aura, que de nombreux opérateurs proposent aujourd’hui contre rétribution, constitue le dernier avatar de cette tradition effluviste.

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La photographie des médiums
La troisième catégorie de photographies occultes est la plus diversifiée. Elle existe quasiment depuis les débuts de la photographie et regroupe des clichés de phénomènes aussi différents que la lévitation, la transfiguration, la télékinésie, la production d’ectoplasmes, ou les apparitions de fées. Malgré la variété des phénomènes et la disparité de leurs manifestations visuelles, les images qui composent cette section ont plusieurs points communs. Tout d’abord, elles ont généralement pour sujet principal des médiums connus pour leur pouvoir surnaturel, et, parfois, leur extravagante biographie. Mais surtout, ces photographies médiumniques se distinguent des photographies spirites ou fluidiques en ce qu’elles ne sont pas un enregistrement de l’invisible, mais bien du visible. Elles correspondent généralement à ce qu’un observateur, présent lors des séances, a pu observer. À la différence des deux premières catégories, la photographie médiumnique n’est donc pas un outil d’investigation plus efficace que l’œil, elle permet un simple constat documentaire.

Face à de telles images, le danger serait d’épouser la croyance de ceux qui les ont réalisées. Il ne s’agira donc pas ici de croire à ces images, mais plutôt de les transformer en objets d’histoire, c’est-à-dire en outil de compréhension des mécanismes humains ou photographiques qui sont en jeu dans ces curieuses expériences de photographie occulte.

Exposition coproduite par le Metropolitan Museum de New York et la Maison Européenne de la Photographie à Paris.

Commissaires scientifiques : Clément Chéroux et Andreas Fischer
Commissaires exécutifs : Pierre Apraxine, Denis Canguilhem et Sophie Schmit