Depuis la fin de la guerre civile libanaise, en 1990, Beyrouth cherche à renouveler son mythe d’une « ville glamour », à la charnière de l’Orient et de l’Occident. Mais l’enchaînement des cycles de destruction et de reconstruction l’éloigne de cette utopie et enlise le pays dans l’incertitude et le désespoir.
Beirutopia est un essai visuel sur la transformation socio-politique et urbaine de Beyrouth, sur les différentes phases de changements brutaux survenus dans la ville depuis la guerre civile, ses métamorphoses et ses multiples visages et histoires. Rassemblant les images réalisées par la photographe libanaise Randa Mirza depuis le début des années 2000, Beirutopia est aussi une projection de l’avenir de Beyrouth. Cette monographie, à portée biographique, apparaît aujourd’hui prémonitoire de l’effondrement en cours du pays.
Le livre se découpe en sept parties — The Sniper (2000-2002) ; Abandoned Rooms (2005-2006) ; Parallel Universes (2006-2009) ; Beirutopia (2010-2019) ; We Promise, We Deliver (2020-2021) ; #crisisbillboards (2021) ; View from Home (2020-2022) — qui reprennent chronologiquement les séries que Randa Mirza a réalisées pendant vingt ans à Beyrouth. Les images de cette artiste visuelle protéiforme sont de natures multiples : diapositives en noir et blanc, photographies argentiques, impressions digitales, captures d’écran de vidéos, montages et collages.
Des textes inédits de Randa Mirza et de Rasha Salti, commissaire d’exposition et écrivaine, complètent cette approche visuelle. D’autres textes d’auteurs libanais et d’autrices sélectionnés par la photographe parmi l’abondante littérature existant sur Beyrouth permettent d’appréhender l’histoire de la ville. Seront ainsi publiés les textes de Ghada al-Samman (écrivaine syrienne, 1942-), Dominique Eddé (écrivaine, romancière et essayiste libanaise, 1953-), Samir Kassir (historien et journaliste politique franco-libanais, 1960-2005), Sahar Mandour (écrivaine et journaliste libano-égyptienne, 1977-), Samer Franghié (homme politique, intellectuel et journaliste libanais, 1945-2017), Liliane Buccianti-Barakat (professeure de géographie urbaine, spécialiste de Beyrouth) et Ghada Sayegh (docteure en études cinématographiques).
Randa Mirza
Née à Beyrouth en 1978, Randa Mirza est une artiste plasticienne qui travaille avec la photographie, la vidéo, l’installation et la performance. Ancrée dans un discours féministe et décolonial, sa pratique artistique interroge les systèmes de pensées hégémoniques et les représentations normées. En rendant visibles les constructions symboliques, sociales et politiques actuelles, son travail questionne le point de vue du regard et les contextes de production et de réception des images, mettant en lumière ce qui est oublié ou intentionnellement caché. Espace de réflexion, de réparation et de résistance face à la violence, sa pratique s’inscrit entre document, expression personnelle et écriture artistique. Randa Mirza a obtenu en 2006 le prix No Limit aux Rencontres Photographiques d’Arles, un prix international qui récompense un photographe ou un artiste qui, par son travail, contribue à repousser les limites de l’expression photographique. Elle a exposé son travail en solo aux Rencontres d’Arles 2019, au Finish Museum of Photography (Finlande), à la galerie Sfeir-Semler (Hamburg), à la Galerie Tanit (Munich/Beyrouth) et au festival Photomed (Sanary-sur-Mer/Beyrouth). Elle a également participé à de nombreuses expositions collectives à la Fondation Merz (Turin), au Witte de With (Rotterdam), au Zentrum fur Kunst und Medientechnologie-ZKM (Allemagne), au Winterthur Museum (Suisse), à la galerie Kashya Hildebrand (Londres), à la galerie Isabelle van den Eynde (Dubai), au Beirut Art Center et au musée Sursock (Beyrouth). En 2023, elle a été lauréate du Photo Folio Review 2023, décerné par les Rencontres d’Arles pour son travail Beirutopia, qui fait l’objet d’une exposition aux Rencontres d’Arles en 2024. Elle est représentée par la Galerie Tanit (Munich/Beyrouth).
Rasha Salti
Rasha Salti est écrivaine, commissaire et programmatrice dans le domaine des arts visuel et du cinéma indépendant. Elle travaille et vit à Beyrouth. Elle a collaboré avec de nombreuses structures et festivals, dont le Jeu de Paume à Paris et la Tate Modern de Londres. En 2009 et 2010, Rasha Salti a été programmatrice du Festival du film d’Abu Dhabi et du Festival du film international de Toronto. Elle a organisé, avec Richard Peña, une rétrospective du cinéma syrien présentée au MoMA de New York. Rasha Salti écrit sur la pratique artistique dans le monde arabe, le cinéma et les questions politiques et sociales générales, en arabe et en anglais. Ses articles et essais ont été publiés dans de nombreuses revues importantes dans le monde entier. Depuis 2006, elle a publié plusieurs ouvrages tels que Insights into Syrian Cinema: Essays and Conversations with Filmmakers Beirut Bereft et The Architecture of the Forsaken and Map of the Derelict avec le photographe Ziad Antar. En 2010, elle a publié I Would Have Smiled: A Tribute to Myrtle Winter-Chaumeny avec Issam Nassar, livre consacré à l’héritage de la photographe britannique fondatrice des archives photographiques de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies.
22 x 28 cm