Entre elles, des fragments moins structurés, à la genèse moins volontariste, prennent place. Parfois en couleur, dans une géographie moins définie, la mer, ses rives, des instants amicaux ou douloureux impriment la pellicule. Des preuves de vie comme en envoient les photographes, carnet de note où l’on enregistre parfois plus que l’on ne restitue, et dont Boudjelal joue avec infiniment de détachement. De discernement aussi, quand ce travail de relecture dont nous sommes les spectateurs, ouvre la porte à de véritables éblouissements camusiens.
Et puis à nouveau le doute, qui ressemble à un TOC tant il ponctue tous les instants, « il faut voir », de peur de voir faux. Une attitude à ranger finalement dans les manifestations d’élégance, qui refuse de montrer une image qui n’allie processus de création et création elle-même, qui n’ait la délicatesse de ne pas altérer le monde que l’on veut nommer, fût-ce au prix d’une apparente candeur technique ou stylistique. Ni vol du réel, ni égocentrisme, on y entrevoit le plaisir d’être contemporain d’un artiste et de son oeuvre. Alors si la photographie est un fait (pris) depuis un point fixe, (placé) sur un point fixe, disons que Bruno Boudjelal s’occupe aussi de ce qui est entre les deux, et que l’on nommera le paysage intérieur.
Thomas Doubliez
Commissariat : Thomas Doubliez
A l’occasion de cette exposition, un catalogue est paru aux éditions Autograph-ABP et Le Bec en l’Air